ESSAYÉ – PAS PU
1.- LE CONTEXTE
Janvier 2020 – le Premier ministre britannique Boris Johnson signe l’accord de sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, saluant «un nouveau chapitre dans l’histoire» de son pays.
Après trois ans de crise politique au Royaume-Uni depuis le référendum de 2016, le Brexit est ratifié par le Parlement européen et entre officiellement en vigueur le 31 janvier.
Janvier 2020 – le prince Harry et son épouse Meghan Markle annoncent leur souhait de vivre au Canada une partie de l’année et de se mettre en retrait de leurs obligations familiales.
Sauf que dans leur cas, la famille est royale et britannique, et règne sur le Royaume-Uni de Grande-Bretagne, l’Irlande du Nord ainsi que sur quinze autres États souverains, appelés royaume du Commonwealth et leurs territoires et dépendances.
LA CLÉ DE VOÛTE S’EFFONDRE
S’éloigner de ses proches n’a rien d’exceptionnel. Prendre du recul, se séparer de son « groupe » est une décision qui peut être prise par n’importe qui, dans n’importe quelle situation.
C’est une réflexion que nous pouvons tous être amenés à avoir un jour ou l’autre.
- Devons-nous accepter les limites du système dans lequel nous baignons et grâce auquel nous avons « droit » à certains avantages ?
- Devons-nous reprendre le commerce de nos parents, qui nous ouvrent les portes, marcher dans leurs pas avec la même profession ?
- Devons-nous, au contraire nous abstenir de tout copié-collé, ne prendre que l’essence de leurs expériences et faire les nôtres personnelles ?
En suivant leurs pas, nous serons dénigrés en cas d’échec par comparaison avec leur réussite passée.
En cas de succès nous serons aussi dénigrés. Car personne – et nous non plus – n’aura la preuve que nous ayons pu réussir sans avoir eu le pied à l’étrier – grâce à eux.
En nous éloignant de leurs pas, les nôtres seront plus difficiles, les premiers plus petits et plus lents, mais là où ils nous mèneront ne sera dû qu’à eux, et à eux seuls.
Prendre nos distances avec « notre famille » qui avait orienté nos choix de vie jusque là, est évidemment complexe. Savoir poser nos propres limites, y faire admettre notre vision est difficile. Dire à nos proches ce qui nous met mal à l’aise n’est jamais simple.
Nous l’avons tous vécu, à différents niveaux, à notre façon. Pour certains c’est le conjoint, pour d’autres c’est le cadre familial qui n’accepte pas leur choix de vie, leur partenaire, une structure professionnelle ou religieuse qui paraît trop astreignante.
Si le cadre de vie peut paraître tout tracé, peut-être depuis plusieurs générations, avec ses avantages et ses inconvénients, le prix à payer pour son allégeance, contre bons soins, peut paraître, néanmoins, trop élevé.
La première envie n’est pas de tout casser, mais d’étendre les limites du système pour y trouver sa place et pour qu’il évolue.
La première envie est de NÉGOCIER de L’INTÉRIEUR les conditions du système.
2.- L’ÉTAT DES LIEUX
Vouloir négocier, c’est confronter le système à ses limites, en remettant en cause un élément qui en est – souvent – sa clé de voûte.
Il y joue la survie de la voûte, car sans la clé, c’est toute la voûte qui peut s’effondrer. Mais s’il ne négocie pas c’est tout le système qui peut s’effondrer.
Mais comment négocier lorsqu’on n’accepte plus le principe d’allégeance et de solidarité d’un système, qu’on ne partage plus l’idéologie imposée sans discussion, ni dialogue ?
Hélas ces systèmes ont souvent comme dénominateur commun, leur déni de toute autre réalité, une idéologie dogmatique et le mépris pour les personnes qui n’ont pas le même avis (les choix des minorités en démocratie).
Cette attitude extrême crée les radicalisés, qu’ils soient de l’écologie (le vegan qui attaquent les boucheries), de gauche et de droite, religieux (anti-islam, anti-juif, Charlie) ou socio-bobo (certains grévistes et certains gilets jaunes).
Mais la radicalisation n’est pas une solution. Elle n’apporte aucune réponse réelle et globale et récolte moins de 0.6 % des voix aux élections européennes (pour les gilets jaunes).
Alors qu’avant tout, on voudrait un vrai plan stratégique global, d’intégration. Un projet de société qui nous permette de comprendre les options à choix, en ayant toute liberté d’y adhérer ou pas. Le système devrait nous faire envie d’y cohabiter et de participer à son projet, à notre façon, avec nos moyens.
LE DÉPHASAGE – IRRÉCONCILIABLE
Mais le déphasage entre ce que disent les membres, porteurs du pouvoir (la majorité en démocratie) – avec leurs représentants, journalistes, maîtres à penser et experts – et la réalité vécue par le sécessionniste est trop grand et souvent impossible à combler.
Les valeurs sont trop différentes. Elles sont irréconciliables. La solution partielle ou élargie, le compromis négocié est souvent hors d’atteinte. Si ce compromis fait vaciller la clé de voûte du système, il est aussi une question de survie pour le dissident qui sans lui s’asphyxie.
Qui ne connaît pas la fable du loup et du chien de La Fontaine ?
La pellicule était indispensable à Kodak. Les clients ont été contents de pouvoir prendre et envoyer des selfies par téléphone. Deux visions irréconciliables ont amené la faillite de Kodak.
LA SÉCESSION
Dès lors, une chose devient prévisible, la SÉCESSION.
Lorsque que le cadre, la famille, l’environnement, est trop lourd, trop rigide, trop engoncé dans ses dogmes, a trop d’assurance, dispose d’un pouvoir trop imposant, le dissident n’a – souvent – plus qu’une seule solution de survie, la rupture.
Devenir non saisissable, sortir du cadre, refuser l’allégeance et divorcer est vu alors comme une libération et l’unique option.
Ce qui est valable entre le Royaume-Uni et l’Union européenne, Meghan et Harry et leur famille, l’est aussi dans un couple, pour un prêtre marié, amoureux de sa femme et fier de son enfant, mais l’est également pour LES ABSTENTIONNISTES.
Dans tous les cas, les systèmes « en place » partagent deux points communs:
- la rigidité imposée par un pouvoir coercitif (y c. par une majorité du plus grand nombre « dite démocratique »)
- des relais – ayant prêté allégeance – dans la chaîne d’informations.
3.- NÉGOCIER LA DIFFÉRENCE
COMMENT EN ARRIVE-T-ON LÀ ?
Deux points de vue s’affrontent, celui des « gardiens du temples » et celui des « dissidents ». La marge de manœuvre est très étroite pour chacun d’entre eux.
LE POINT DE VUE DES « GARDIENS DU TEMPLE »
Avant toute séparation, il y a eu des tensions, des divergences, dans les couples – pas seulement entre le Royaume-Uni et l’Union européenne – qui n’ont pas su/pu être traité.
Il y a une fracture dans le processus. Le système ne le renie pas, mais il y voit un danger et ne sait pas comment s’en protéger.
Kodak a vu le danger, a senti venir une mutation puisqu’il a été le premier a déposer un brevet pour un appareil de photo numérique. Mais il n’a pas su comment se passer de la pellicule.
Le chien en laisse dans la fable (de 1668) de La Fontaine fait «allégeance » au système en échange d’avantages. Il ne comprend pas – comme les « gardiens du temple » – qu’on puisse refuser ces avantages et cette sécurité, même au prix de la liberté.
Leur force : LE GRAND NOMBRE et LA TRADITION
Leur peur : LA FAMINE
LE POINT DE VUE DU DISSIDENT – LE CHOIX – SE RENDRE INSAISISSABLE
Le loup dans la même fable, pense – comme les dissidents – que le prix à payer pour un collier ne vaudra jamais la sécurité et les avantages promis (qu’il sait trouver ailleurs). Être libre et sortir du cadre c’est avant tout une question de survie. Les dissidents ne se voient pas continuer à jouer dans l’orchestre lorsque le Titanic est entrain de couler. C’est une question de vie ou de mort.
Ces deux visions sont irréconciliables. C’est là tout le problème.
Les dissidents sont moins sensibles à la peur. Les menaces d’un châtiment « qui ne manquera pas de les accabler un jour » les laissent de marbre. Ils pensent d’ailleurs que les « gardiens du temple » – trop peureux – identifient mal la menace.
Pour eux le vrai péril est ailleurs, c’est celui de ne pas pouvoir vivre leur choix.
C’est ce qui fait leur différence et leur force.
Leur force : CAPABLES DE FAIRE LEURS PROPRES CHOIX.
Leur peur : L’ASPHYXIE
LAISSER à CHACUN SON CHOIX – SA DIFFÉRENCE
Un point reste souvent définitivement irréconciliable.
- Comment défendre la légitimité d’un système qui impose une seule et UNIQUE SOLUTION À TOUS – (même s’il se dit « participatif / démocratique ») – lorsqu’elle ne représente le choix que d’une faible majorité réelle ?
Le choix imposé des « élus majoritaires » – ne sera JAMAIS légitime pour les « exclus minoritaires / dissidents » dont font partie les ABSTENTIONNISTES.
Pourquoi ne pas prévoir moins d’autorité et plus de liberté, plus de compromis ?
Pourquoi dois-je – vraiment – payer pour des abris PC qui n’ont sauvé aucune vie depuis 1945 ? Pourquoi ne pas tolérer que je prenne le risque de ne pas avoir ma place protégée ? Pourquoi m’est-elle imposée ?
4.- LA RUPTURE
INTÉRÊTS PARTICULIERS contre INTÉRÊT GÉNÉRAL
Ccmment s’en sortir ?
Chacun se pose la même question, et chacun a une limite différente à l’allégeance pour un système. Respectons cette différence et les différentes réponses car la survie du système en dépend.
Le cadre impose la prédominance des intérêts généraux sur l’intérêt particulier, jusqu’au moment où ces individus – dont on n’a pas respecté les intérêts personnels – se radicalisent ou sortent du système.
Le système a tout à perdre de sa remise en cause, mais encore plus de son abandon. Pensez à « l’ex maître » de la pellicule.
Et si l’intérêt général c’était – justement – de mieux tenir compte des intérêts particuliers « différents – divergents» ? Et si l’intérêt général avait tout à gagner de cette ouverture, de cette cohabitation afin d’éviter la radicalisation et la rupture ?
Et si la DÉMOCRATIE ne se comportait plus comme une DICTATURE du plus grand nombre ?
LE RISQUE – Le fractionnement de la société.
Lorsque le pays sera complètement fractionné – en UNE MAJORITÉ de petits groupes minoritaires n’ayant JAMAIS accès à leurs solutions, IL SERA TROP TARD.
Aujourd’hui chez nous, le principal problème de CLIMAT est définitivement un problème de CLIMAT SOCIAL.
COMMENT FAIRE AUTREMENT?
L’évolution et la résolution des problèmes peuvent avoir des visages très différents de ce qui était prévu. N’est-ce pas Kodak ? N’est-ce pas aussi Nobel, Edison ou Ingvar ?
AVEC QUI FAIRE AUTRE CHOSE ?
Tout le monde n’est pas Richard Burton et Liz Taylor.
La rupture est souvent définitive et irrévocable. Elle peut être salvatrice également.
« Si le film est mauvais, désolé, je sors ».
JUGÉS SUR LEURS RÉSULTATS
Laissons Meghan et Harry aller jusqu’au bout de leur option et on verra bien. Ils sont libres de leur destin après tout. Peut-être ce couple aurait-il modernisé la couronne britannique et l’aurait-il même sauvé – qui sait – comme l’appareil – disruptif – numérique aurait, c’est certain sauvé Kodak.
Wait and see.
Dans toutes les ruptures, le seul échec, c’est de passer à côté d’une réforme drastique, nécessaire et profitable, du système en place.
La réalité joue – souvent – un mauvais tour à tous nos « gardiens du temple ». Les faits ne donnent pas toujours raison aux oiseaux de mauvaise augure.
Parce que les Suisses n’avaient pas voté comme le souhaitait leur gouvernement, le 6 décembre 1992 était devenu « une journée triste et noire » pour nos « gardiens du temple ». Étiez-vous tristes le jour du refus en votation populaire de l’adhésion de la Suisse à l’Espace Économique Européen ? L’êtes-vous aujourd’hui ?
Pour l’Europe et la couronne britannique, les « gardiens du temple » ne réagissent pas différemment face au choix du Royaume Unie et de Meghan et Harry.
Pourtant ils devraient savoir que cela ne nous a pas trop mal réussi en définitive.
Rendez-vous dans 20 ans pour juger des résultats. Opterez-vous pour la voie prise par Meghan et Harry, ou plutôt celle du prince (devenu roi ?) Charles resté dans les clous du royaume, pour les Brexiters qui disaient que le Royaume Uni deviendrait plus fort et plus riche, ou pour les anti-Brexiters qui prévoyaient l’Apocalypse ?
Choisirez-vous la France, qui a désavoué le choix de ses habitants après la votation du 29 mai 2005 ? Choisirez-vous la Suisse ?
Une rupture, un désaccord n’est pas un échec, sauf – souvent – pour le système en place.
L’échec d’intégration dans un groupe n’est pas un critère de performance. Il ne dit rien des capacités du membre – si ce n’est son niveau de tolérance, d’abnégation, de soumission et d’allégeance. Or on ne compte plus les personnes qui ont réussi leur second mariage ou ont trouvé le bonheur à l’occasion d’un nouvel emploi.
Meghan m’a fait du bien. Elle n’a pas accepté n’importe quel rôle dans le cinéma de la couronne. Je saurai m’en souvenir au prochain casting que m’offrira la vie. Merci Meghan.
LA RECONSTRUCTION
Aujourd’hui la rupture devient de plus en plus facile, les choix alternatifs de plus en plus nombreux, attractifs et documentés.
Ils nous mettent face à aux conséquences de nos choix comme jamais, même celui de ne rien faire et de rester membre du « temple ». Ces choix nous rendent libres de nos méthodes et donc responsables de nos résultats.
Les Britanniques pensent que leur nation a droit à sa souveraineté. Meghan et Harry à leur vie, les ABSTENTIONNISTES à leurs choix, même si pour cela il faut quitter le système.
C’est pour cela qu’ils se battent, pour ne pas abandonner leur vision, leur espérance, pour ne pas se renier en se repliant sur les valeurs que leur contexte leur a imposées et dont le prix à payer leur paraît trop grand.
Out of the box. Laissons-les faire leur(s) choix. Ils ont toute mon indulgence.
- Ne rien faire est pénible, mais l’asphyxie est mortelle.
5.- AU REVOIR et MERCI
ESSAYÉ – PAS PU
BLOG PERSPECTYVES
Janvier 2020 – un nouveau virus fait plus de 100 morts en quelques jours et relativise les propos alarmistes d’une militante suédoise et de ses relayeurs d’informations et autres pourfendeurs de Nutella.
Janvier 2020 – Éric Drouet annonce qu’il quitte le mouvement des gilets jaunes dont le bilan s’élève à 10 718 gardes à vue, 3 163 condamnations, dont 400 fermes, 10 morts, 850 millions d’euros de perte pour les commerçants, 200 millions pour les dégâts pour moins de 0.6 % des voix aux élections européennes.
Janvier 2020 – c’est – également – la fin de ma participation aux blogs de la Tribune de Genève avec PERSPECTYVES. Je vous remercie de me lire et de m’avoir lu. Je remercie la Tribune de m’avoir hébergé et d’avoir permis cette expérience.
En m’invitant dans la communauté des blogs, j’avais espéré un large échange d’idées nouvelles, COMBINÉES et ENRICHIES par des commentaires éclairants différemment certains aspects.
Malheureusement, le système MAJORITAIRE a FORMATÉ notre façon de débattre. Nous ne vérifions plus la PERTINENCE de l’idée mais si elle emporte une majorité, aussi faible soit-elle. Triste.
Une vision disruptive des échanges d’idées et d’opinions reste l’énorme chance de développement de nos médias.
J’avais espéré co-écrire mon blog, en partageant avec un – ou plusieurs – partenaire, voire journaliste, la partie rédactionnelle. Je n’ai essuyé que des refus (à une notable exception que je profite de remercier chaleureusement. L’auteur se reconnaîtra). Je n’ai pas trouvé ce que je cherchais, je l’avoue.
La BONNE NOUVELLE est qu’il y a une vie après la séparation. On reconstruit – peut-être différemment – un nouveau couple, un nouvel environnement familial, religieux et social. On y développe ses capacités enrichies des expériences passées.
Je ne me fais aucun souci pour Meghan et Harry, ni pour le Royaume Uni. Je sais que le nouveau projet que je développe, profitera également de l’expérience de PERSPECTYVES.
L’AUTRE BONNE NOUVELLE est qu’un jour, quelqu’un comprendra et viendra avec une nouvelle façon de traiter la gestion de la vie en groupe. Une – très faible – majorité ne suffira plus à imposer – souvent – à une très forte minorité – ses options. L’information unique et consensuelle sera caduque, nos médias obsolètes.
Personne n’aura de regrets à leur disparition. Ils auront fait leur temps et ils seront morts d’avoir pensé qu’il suffisait d’avoir le monopole pour survivre.
Ce qui en émergera – et son appropriation facile par tout le monde – sera un véritable innovation. On découvrira qu’il est possible de faire « des selfies de l’information », d’être autonome. Et personne ne regrettera le passé qui n’a pas voulu évoluer – comme Kodak.
Personnellement, je suis incapable de dire si le Brexit, le départ de Meghan et Harry est une bonne ou une mauvaise chose. Mais tous mes souhaits accompagnent ces « vilains petits canards aujourd’hui » – afin que demain ils se réalisent en cygnes.
Avec PERSPECTYVES, j’ai essayé de trouver une place, de m’intégrer dans ce contexte, de négocier une autre façon de voir et de le dire.
Pas pu. Je reste ABSTENTIONNISTE.
Le moment est venu de nous séparer.
AU REVOIR et MERCI
Je vous souhaite une belle et agréable journée.